La société Géosel, exploitant des étangs de saumure de Lavalduc et de l’Engrenier à Fos-sur-Mer, envisage, dans le cadre du projet baptisé HyVence de couvrir plus de 80 % de étangs de 500 ha de panneaux solaires et d’installer et exploiter une usine de fabrication d’hydrogène sur le Plan d’Aren, qui sépare les deux étangs.
Dès les premières rencontres qu’elle a eues avec le porteur de projet, notre fédération agréée d’associations de protection de la nature et de l’environnement lui a fait part de sa surprise que soit envisagée une telle mutation d’un site aujourd’hui préservé de l’urbanisation et de l’industrialisation. Le porteur de projet s’est alors engagé à ce que soit démontré, outre sa forte contribution à la transition énergétique, son faible impact sur l’environnement, voire l’amélioration de ce dernier, historiquement marqué par l’industrie.
Les éléments apportés au cours de la période de concertation, s’ils ont pu refléter un effort certain d’intégration paysagère, n’en ont pas moins mis en lumière les risques d’atteinte à la biodiversité et au cadre de vie, rendant ce projet difficilement acceptable par la population, marquée par l’impact des industries à l’ouest de la commune.
L’usine de fabrication d’hydrogène
L’énergie électrique ne pouvant se stocker (autrement que dans des batteries), le vecteur hydrogène a été présenté historiquement comme pouvant être fabriquer pendant les périodes où les énergies renouvelables ne peuvent être directement consommées sur le réseau. Depuis, le principe a été inversé puisque il est désormais question, notamment ici, de produire de l’hydrogène en continu, quitte à alimenter l’électrolyseur, en dehors des période de production solaire, par le réseau électrique national, via une ligne à haute tension, a priori enterrée.
La production d’hydrogène serait néanmoins réputée « verte », par convention d’écriture, du fait du
renvoi vers le réseau de l’énergie électrique produite en surnombre, à certaines périodes, par les 500 ha de panneaux solaires. A aucun moment n’est envisagé une modification du rythme des procédés consommateurs d’hydrogène sur le site de Lavéra, ni du volume produit, aujourd’hui destiné à 45 % au raffinage du pétrole et pour 45 % à la fabrication d’engrais, d’ammoniaque et d’explosifs.
En outre, la production massive d’hydrogène nécessite beaucoup d’eau douce, laquelle n’est pas disponible sur le site des étangs de Lavalduc et de l’Engrenier. D’autres motifs rendent inacceptable l’implantation de cette usine sur le Plan d’Aren :
- nécessité de remblais pour la préserver de l’inondabilité
- nuisances en phase de chantier et d’exploitation : bruit permanent, aménagement et trafic routier
- entrave aux possibilités de randonnée
- biodiversité (dont espèces protégées), loin d’être négligeable (cf. ci-après)
On s’étonnera d’ailleurs que ce site ait récemment pu être faire l’objet d’une demande de déclassement de son statut de zone naturelle, alors même que son histoire industrielle remonte à plus de 150 ans et que la nature a, depuis, largement repris ses droits. De même, il est assez scandaleux qu’il puisse bénéficier du « fonds friche » alors même qu’il ne remplit pas les critères requis.
Une présentation erronée des enjeux de biodiversité
Plusieurs interventions ont, au fil des réunions publiques, permis de mettre en lumière que les éléments de l’étude EcoMed ont été tronqués, et ne reprennent pas l’ensemble des données environnementales disponibles par ailleurs :
- base de données Silene, fiche ZNIEFF,
- étude d’impact réalisée par Egis pour la concertation sur la liaison Salon-Fos
- relevés présentés par l’association Cistude lors de l’atelier « Usages et paysages » du 24 avril à Saint-Mitre.
Il faut surtout noter que la Zone Naturelle d’Intérêt Écologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF) des Etangs de Lavalduc et de l’Engrenier, continentale de type I, fait partie d’un ensemble plus vaste : la ZNIEFF de type II des étangs de Lavalduc, de l’Engrenier, de Citis, du Pourra et des Salins de Rassuen, qui traduit à la fois la richesse biologique intrinsèque du site et son rôle majeur dans un ensemble écosystémique remarquable plus large constitué par un chapelet de zones humides séparées par des zones forestières ou agricoles.
L’étude d’Eco-Med fait état de 178 espèces d’invertébrés, 6 espèces d’amphibiens, 10 espèces de reptiles, 86 espèces d’oiseaux, 26 espèces de mammifères dont 16 de chiroptères, 180 espèces floristiques. Cet inventaire n’est pas définitif et sera abondé par les données 2024. Un grand nombre de ces espèces bénéficient d’une protection régionale ou nationale, dont le flamant rose, le Tadorne de Belon, le Gravelot à collier interrompu, l’Avocette élégante, l’Échasse blanche, le Seps strié et le Psammodrome cendré, la Zygène cendrée. Six espèces végétales protégées sont présentes dont le Limonium plutôt dur, le Limonium de Provence, le Myosotis fluet (Myosotis pusila). Le Liseron rayé et la Steppe à Limonium occupent notamment la partie du Plan d’Aren concernée par le projet d’usine. L’abondance de ces espèces est telle qu’aucune compensation de leur destruction ne peut être sérieusement envisagée.
La nécessaire préservation d’un lieu où la population se ressource
Les Étangs de Lavalduc, de l’Engrenier et de L’Estomac jouent un rôle relais entre la Crau et l’Étang de Berre et revêtent un grand intérêt pour l’avifaune aquatique et paludicole, mais c’est aussi un site naturel fréquenté quotidiennement par de multiples usagers, d’autant plus précieux qu’il échappe à l’industrialisation et à l’urbanisation.
En ce lieu unique se ressourcent les randonneurs, les cavaliers, les cyclistes, les naturalistes, les
promeneurs, les écoliers, les collégiens, les lycéens, les étudiants, les archéologues, les photographes, les peintres, les amateurs de couchers de soleil flamboyants, les contemplateurs de flamants roses, les artistes, les poètes…
Dans ce contexte, FNE13 ne peut qu’émettre un avis défavorable sur le projet HyVence.