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ArcelorMittal mis en examen pour pollution à Fos

Le géant de l’acier ArcelorMittal a été mis en examen pour « mise en danger d’autrui » et « faux et usage de faux » dans une affaire de pollution industrielle.

Cette décision judiciaire, révélée par le parquet de Marseille mardi 25 mars, fait suite à une plainte déposée en 2019 par près de 300 riverains et associations environnementales, dénonçant des années d’exposition à des rejets toxiques illégaux.

Une mise en examen après six ans d’enquête

L’instruction, ouverte il y a six ans, a abouti à la mise en examen du groupe le 19 mars par le pôle environnemental du tribunal de Marseille. ArcelorMittal a été placé sous contrôle judiciaire, avec une caution de 250 000 euros et une garantie bancaire de 1,7 million d’euros, a précisé le procureur de la République de Marseille.

Selon les investigations menées par Mediapart et confirmées par les autorités judiciaires, l’entreprise aurait dépassé les seuils légaux de rejets polluants, notamment en émissions cancérogènes, et aurait falsifié des rapports transmis aux services de contrôle. Entre 2014 et 2019, près d’un tiers des polluants soumis à surveillance continue auraient ainsi échappé aux radars.

Des accidents industriels et des manquements répétés

L’enquête révèle également des défaillances graves dans la maintenance des installations. En mars 2022, une fuite de 75 000 m³ de gaz toxiques et cancérogènes s’est produite, mettant en lumière les risques encourus par les habitants. Les associations dénoncent depuis des années l’impact sanitaire de cette pollution, avec des taux anormalement élevés de cancers et de maladies respiratoires dans la zone.

En substance, il est reproché à la société aux dirigeants de la société :

  • d’avoir falsifié certaines données (chiffres) d’autosurveillance en matière d’émission de polluants dans l’air ;
  • de ne pas avoir respecté de manière récurrente la réglementation encadrant son activité en tant qu’Installation Classée pour la Protection de l’Environnement (ICPE), et notamment ses émissions polluantes, portant ainsi gravement atteinte à la santé des personnes, aux milieux naturels, à la faune et la flore ;
  • d’avoir mise en danger la vie d’autrui en exposant la population et les travailleurs, par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente.

Des questions sur le rôle des autorités de contrôle

L’affaire soulève aussi des interrogations sur l’efficacité des contrôles étatiques. Les services de la préfecture sont pointés du doigt pour leur manque de réactivité, alors que l’entreprise a bénéficié de près d’1 milliard d’euros de fonds publics depuis 2014.

Cette mise en examen marque un tournant dans un dossier qui oppose depuis vingt ans industriels, citoyens et défenseurs de l’environnement. Le procès à venir pourrait faire jurisprudence en matière de responsabilité environnementale des multinationales.

Rappelons qu’en 2021, déjà, le Tribunal avait condamné le site d’ArcelorMittal à Fos-sur-Mer pour 36 infractions environnementales sur la base d’une action juridique menée par France Nature Environnement Bouches-du-Rhône et France Nature Environnement PACA.


Crédit photo : © CC Source: pixabay.com / Auteur: Annabel_P